I = I est une question qui relève des droits de l’homme
Carrie Foote vit avec le VIH depuis 1988 et est l'un des membres fondateurs de la campagne I = I, lancée en 2016. I = I signifie Indétectable = Intransmissible et la campagne travaille avec des partenaires communautaires dans près de 100 pays. La campagne vise à communiquer les conclusions d'une série d'études selon lesquelles les personnes séropositives sous traitement efficace ne peuvent pas transmettre le VIH à leurs partenaires sexuels.
Pour les personnes vivant avec le VIH, I =I a le potentiel de transformer leur vie sociale, sexuelle et reproductive tout en aidant à démanteler la stigmatisation. « La stigmatisation nous tue », ajoute Dr. Foote. « La stigmatisation liée au VIH est une urgence de santé publique et I = I est une réponse immédiate et efficace pour commencer à démanteler la stigmatisation. »
Un symposium tenu lors de la conférence a mis en lumière des questions relatives à I = I, telles que le langage utilisé à propos de l'indétectabilité, les inégalités qui affectent l'accès aux traitements et son observance, les questions cliniques relatives au risque et l'importance de l'accès aux mesures de la charge virale dans les environnement aux ressources limitées.
La connaissance du taux de cellules CD4 est-elle toujours utile à l’ère du traitement pour tous?
Le taux des cellules CD4 mesure la santé du système immunitaire et l’étendue des dommages causés par le VIH. Un taux de CD4 inférieur à 200 cellules/mm3 indique un risque élevé d'infections opportunistes. Dans le passé, de nombreux pays limitaient l’accès au traitement aux personnes dont le taux de CD4 était inférieur à 500 ou 350. Pour cette raison, le taux des cellules CD4 était mesuré de façon routinière.
Dans la plupart des pays, les directives thérapeutiques recommandent désormais d’administrer le traitement dès que possible à toutes les personnes séropositives, quel que soit le taux de cellules CD4. Les données de six pays d'Afrique australe, présentées au cours de la conférence, montrent que le taux de cellules CD4 n’est plus souvent mesuré. Ceci inquiète certains chercheurs, qui affirment que cette analyse est toujours nécessaire pour identifier les personnes dont le taux de cellules CD4 est très bas, et qui ont donc besoin d’être suivies de près et de prendre une prophylaxie contre les infections opportunistes. Cependant, lorsque les ressources sont limitées, certains pensent que l'expansion des tests de charge virale devrait passer en priorité.
Des chercheurs zambiens ont examiné la relation entre l’analyse du taux de CD4 et la mortalité entre 2013 et 2015 chez les personnes suivant un traitement contre le VIH dans quatre provinces. Les résultats ont montré que ne pas mesurer le taux de cellules CD4 avant le traitement était associé à un risque accru de décès, probablement dû à des infections opportunistes non diagnostiquées.
Une étude menée au Botswana a révélé qu'un quart des personnes se présentent toujours dans les centres de soins avec un taux de CD4 inférieur à 200. Si l'on examine les changements dans le taux de CD4 chez les personnes qui ont commencé le traitement au-delà de ce seuil, seule une très faible proportion ont vu leur taux de CD4 chuter en dessous de 200 après la mesure initiale, et pour la majorité, le taux de CD4 suivant était supérieur à 200. Les chercheurs ont conclu qu'il y avait très peu d'avantages à poursuivre une surveillance continue des CD4 si le taux de cellules CD4 était supérieur à 200 au début du traitement, mais qu’un test de référence était essentiel pour identifier les personnes ayant un faible nombre de CD4.
Une personne séropositive sur six en Afrique du Sud a un VIH pharmacorésistant avant de commencer le traitement
Une grande enquête auprès des ménages menée en Afrique du Sud a révélé qu'une personne séropositive sur six n’étant pas encore sous traitement avait déjà un VIH pharmacorésistant et que plus de la moitié des personnes sous traitement avaient une résistance à au moins un médicament.
L'enquête a consisté à analyser des taches de sang séché sur un échantillon représentatif de la population sud-africaine. Chez ceux qui prenaient des antirétroviraux, 55,7 % présentaient au moins une mutation de résistance aux médicaments, le plus souvent aux classes des inhibiteurs non nucléosidiques de la transcriptase inverse (INNTI) et aux nucléosides/nucléotides de la transcriptase inverse (INTI). Parmi les personnes qui n'avaient jamais pris d'antirétroviraux, 15,3 % présentaient une pharmacorésistance, toutes aux INNTI.
L'évaluation de l'ampleur de la résistance aux antirétroviraux, qui donne à réfléchir, a conduit les chercheurs à demander d’accorder la priorité à l'utilisation des inhibiteurs de l'intégrase dans les traitements de première intention et à offrir un soutien à l'observance plus important aux personnes sous traitement antirétroviral. Ils recommandent également d’arrêter plus tôt un traitement qui échoue et de passer à un autre pour éviter l'apparition d’autres pharmacorésistances.
Fait plus encourageant, une autre étude présentée à la conférence a révélé que les taux de réponse virologique étaient excellents chez les personnes recevant un traitement antirétroviral de deuxième intention à base de dolutégravir, même lorsque les traitements comprenaient un INTI contre lequel une résistance préexistait.
Un inhibiteur de la capside offrirait une suppression virale à long terme
Les inhibiteurs de la capside sont une nouvelle classe d'antirétroviraux qui interfère avec l'assemblage et le désassemblage de la capside du VIH, l'enveloppe qui renferme le profil génétique du virus.
Les résultats d'une étude de phase I, chez 40 volontaires séronégatifs, évaluant l'innocuité et la pharmacocinétique du nouveau médicament, connu sous le nom de GS-6207, ont été présentés. Pris sous forme d'injection sous-cutanée, les doses plus élevées du médicament semblent rester dans l'organisme suffisamment longtemps pour permettre une injection tous les trois mois. Le médicament semble bien toléré.
Les personnes séropositives pourraient bénéficier d’un dépistage précoce du cancer du poumon
Selon une étude présentée à la CROI 2019, les personnes séropositives, en particulier les femmes, peuvent développer un cancer du poumon à un plus jeune âge sans avoir des antécédents lourds de tabagisme par rapport à la population générale. Les personnes séropositives sont plus susceptibles de fumer, mais l’état du système immunitaire et d'autres facteurs liés au VIH pourraient également contribuer à cette disparité.
Les chercheurs ont évalué si les critères utilisés dans l’essai américain de dépistage national du poumon (US National Lung Screening Trial) identifiaient le cancer du poumon chez les hommes et les femmes vivant avec le VIH. Aux États-Unis, le dépistage annuel est recommandé aux personnes âgées de 55 à 80 ans ayant des antécédents de tabagisme d'au moins 30 “années-paquet” (une année-paquet est définie 20 cigarettes par jour pendant un an), qui fument encore ou qui ont cessé de fumer au cours des 15 dernières années. Cependant, dans deux grandes cohortes de personnes vivant avec le VIH, seulement 16 % des femmes et 24 % des hommes atteints d’un cancer du poumon répondaient aux critères de dépistage. Les chercheurs ont conclu que pour mieux identifier les personnes vivant avec le VIH devant faire l'objet d'un dépistage du cancer du poumon, il fallait baisser les seuils d'âge et de tabagisme.
Une autre étude a porté sur les facteurs de risque de cancer du foie chez les participants séropositifs de l'étude de la cohorte des anciens combattants vieillissants. L'analyse a porté sur 2 497 personnes atteintes de fibrose ou de cirrhose avancée et 29 836 personnes atteintes de fibrose légère ou modérée ou sans fibrose. Au cours du suivi, 278 personnes ont reçu un diagnostic de cancer du foie et 43 % d'entre elles n'avaient pas de fibrose ou de cirrhose avancée. La co-infection à l'hépatite B ou C était associée à un risque plus élevé de cancer du foie quel que soit le taux de fibrose. Parmi ceux qui n'avaient pas de fibrose extensive, une charge virale plus élevée ou un taux de CD4 inférieur à 200 étaient associés à un risque accru de cancer du foie.
Augmentation du taux d’infection au VIH observée chez les nourrissons nés de mères séropositives ayant une charge virale d’hépatite B élevée
L'analyse se fonde sur les données d'un essai qui a eu lieu en Afrique subsaharienne, entre 2007 et 2010, et a inclus 2016 mères avec 2041 nourrissons.
Après ajustement prenant en compte le taux des cellules CD4 maternelles, l'âge et le traitement maternel contre le VIH, les nourrissons nés de mères présentant une charge virale élevée pour l'hépatite B étaient plus susceptibles de contracter le VIH (20 %) que les nourrissons nés de mères atteintes uniquement du VIH (4 %) ou présentant de faibles taux de charge virale pour l'hépatite B (0 %).
Elle a également constaté qu'une charge virale élevée du virus de l'hépatite B augmentait les risques pour les nourrissons d’avoir des problèmes, comme un poids faible à la naissance.
Le Dr Debika Bhattarcharya, qui présentait, a conclu que la réduction de la charge virale de l'hépatite B chez la mère avait des avantages au-delà de la prévention de la transmission périnatale du virus de l'hépatite B.
Le traitement à base de dolutégravir en association avec le traitement préventif 3HP contre la tuberculose est bien toléré
L'Organisation mondiale de la santé (OMS) recommande le dolutégravir aux personnes qui commencent un traitement contre le VIH pour la première fois. L'OMS recommande également un traitement préventif pour les personnes atteintes d'une infection tuberculeuse latente avec 12 doses hebdomadaires de 3HP dans les pays à forte incidence de tuberculose. Cependant, les interactions médicamenteuses avec les antirétroviraux pourraient rendre cette association problématique pour les personnes vivant avec le VIH, et cette étude visait à déterminer si les deux traitements pouvaient être pris ensemble sans danger.
Soixante personnes séropositives ont participé à l'étude, et ont pris du dolutégravir (50 mg une fois par jour) avec du ténofovir et de l'emtricitabine (Truvada) plus une dose hebdomadaire de 3HP (900 mg de rifapentine et 900 mg d'isoniazide) pendant 12 semaines. L'analyse pharmacocinétique d'échantillons de sang a examiné l'effet du 3HP sur la concentration de dolutégravir.
L'étude a révélé que la concentration sanguine du dolutégravir diminuait, mais que les concentrations médianes les plus faibles étaient toujours supérieures à la valeur cible et que tous les participants maintenaient une charge virale indétectable.
Une technique de traitement curatif plus doux retarde le rebond viral chez certaines personnes qui arrêtent le traitement anti-VIH
Parmi les nouvelles de la CROI 2019, celle qui a était le plus souvent rapportée concerne la guérison possible du VIH chez une deuxième personne à la suite d'une greffe de la moelle osseuse. Mais l'intervention est très risquée et ne serait pas tentée chez un patient sans cancer.
La procédure consiste à remplacer les lymphocytes T du patient par ceux de donneurs présentant une mutation génétique appelée CCR5-delta 32. Cette mutation signifie que leurs cellules n'ont pas à leur surface la molécule réceptrice du CCR5 sur laquelle la plupart des souches du VIH doivent se fixer avant de pouvoir infecter une cellule.
Dans une étude également présentée à la CROI, les chercheurs ont reproduit le changement génétique en utilisant une technique plus sûre et reproductible. Ils ont cultivé des lymphocytes T prélevés sur 15 personnes séropositives avec une enzyme éditrice de gènes appelée nucléase du doigt de zinc, qui a eu le même effet.
Les cellules ont été transfusées aux participants de l'étude et huit semaines plus tard, ils ont cessé de prendre leur traitement antirétroviral pendant la période prévue de 16 semaines. Chez tous les participants, la charge virale du VIH a réapparue et la proportion de lymphocytes T négatives au CCR5 a lentement diminué.
Certaines personnes possèdent naturellement une copie du gène CCR5-delta-32 et ce fut le cas pour cinq participants à l'étude. L'étude a révélé que la charge virale dans ce groupe réapparaissait plus lentement que chez les autres participants. Deux participants n'ont repris le traitement du VIH que 20 et 32 semaines après l'interruption de leur traitement.
Bien que cette expérience n'ait pas produit de rémission à long terme, c’est un moyen plus sûr, plus répétable et non toxique de créer une population de lymphocytes T résistants au VIH qui peuvent être transfusés dans l'organisme et qui peuvent retarder, dans une certaine mesure, le rebond viral du VIH.
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